Sommeil et médecine générale

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Pelvis et sommeil

"La bandaison papa... ça n’se commande pas !"
George Brassens, 1972, "Fernande".

mardi 14 août 2007, par guilhem

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Pelvis et fatigue...

Les troubles fonctionnels associés à un état de fatigue peuvent intéresser la région du pelvis (troubles fonctionnels urinaires, digestifs et sexuels). En l’absence d’argument lésionnel, ils sont considérés de nature neurodystonique.
Dans certaines conditions, ces troubles de la régulation automatique des organes qui siègent dans le "bas ventre" peut traduire un état de fatigue consécutif à une désynchronisation des horloges internes.

Ces troubles, par définition, et comme l’ensemble des autres troubles neurodystoniques, présentent quatre caractéristiques : ils sont inquiétants, handicapants, capricieux et, au final, relativement bénins parce qu’ils ne présentent aucune conséquence objective..
Selon notre hypothèse, ils faut les considérer comme des signes d’alarme d’un "syndrome d’hyposommeil" et leur traitement nécessite une prise en charge du trouble sous-jacent.
Ici encore, il est indispensable de comprendre avant d’agir.

Ces troubles fonctionnels "neurodystoniques" qui siègent dans la région basse de l’abdomen se rencontrent très fréquemment en médecine générale.

Il est possible de les regrouper de la manière suivante :

Ils imposent naturellement un bilan médical complet mais, par définition ici, le médecin et le malade se retrouveront confrontés à une absence d’explication véritablement convaincante.
En l’absence d’explication satisfaisante, et dès lors qu’on n’admet pas l’importance du sommeil, on ne tardera pas à évoquer un "trouble psychologique".


  • Troubles urinaires :
  • - Chez l’enfant
    Voir énurésie dans l’article "parasomnies".
    Le "pipi au lit" est en rapport avec un trouble du sommeil d’origine essentiellement génétique (présence d’un terrain familial).

    - Chez l’homme
    La polyurie (besoin anormalement fréquent d’uriner) est un symptôme souvent rapporté au "stress" ou a la fatigue.
    Lorsque le bilan urologique est normal, il faut savoir envisager un phénomène neurodystonique des muscles de la vessie qui peut conduire à un tableau de "pseudo-prostatisme" (besoin incessant d’uriner analogue à ce dont se plaignent les hommes atteint d’une hypertrophie de la prostate).

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    Biofeedback
    • Ici, la prostate est normale (ou d’une taille non significative). certains conseils couplets à des séances de rééducation (par rétro-contrôle de type "biofeedback", par exemple), peuvent, semble-t’il donner de bons résultats).
    • Lorsque on dépiste une "grosse" prostate, une opération chirurgicale est à terme inéluctable (surtout si la gêne est importante).
      Mais parfois le bilan s’avère normal ou peu contributif et il n’y a pas d’explication à cet incessant besoin d’uriner. On évoque alors toutes sortes d’hypothèses plus ou moins controversées qui contribuent à retarder le diagnostic.

      Dans notre expérience ces troubles urinaires mal expliqués qui surviennent dans un contexte de fatigue doivent conduire à un bilan approfondi du sommeil (et donc, des habitudes de vie).
    • Nb. En cas de somnolence diurne excessive avérée (Cf.), il faut savoir évoquer la possibilité d’un trouble respiratoire du sommeil : Le "syndrome d’apnée du sommeil"par exemple, se caractérise par l’apparition d’une polyurie à prédominance nocturne.


    Les connaissances en médecine du sommeil sont encore récentes et la présence d’un trouble urinaire ne doit pas systématiquement conduire à un diagnostic trop simpliste de "tuyauterie".
    Certaines dysuries peuvent s’intégrer parmi les troubles fonctionnels neurodystoniques qui surviennent sur un terrain de fatigue [1]. Ici, une opération chirurgicale intempestive sur la prostate aggraverait considérablement la situation...
    Cf. "Problématique du Pseudo vrai malade".

    - Chez la femme
    La Fatigue peut se manifester par un tableau de pseudo cystite.
    <br<C’est probablement le cas lorsqu’on évoque la "cystite à urines claires".
    Le terme est utilisé par opposition aux vraies infections de la vessie qui se traduisent elles, par la présence anormale de globules blancs et rouges dans les urines. Ces éléments qui sont facilement repérables à l’aide de bandelettes urinaires troublent les urines (d’où le nom"à urine claire" lorsque ce n’est pas le cas).
    lorsqu’il est positif , ce test urinaire impose un traitement antibiotique adapté.

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    "renouveler toutes les heures"
    (en pensant à autre chose...)


    Les antibiotiques sont impuissants dans ces tableaux de cystite qui ne sont pas, non plus, objectivables aux tests urinaires.
    La plainte des malades est réelle (brulure urinaires et besoin incessant). Elle fait évoquer une infection de la vessie mais ici, le traitement conventionnel n’apparait pas plus efficace que les méthodes dites "douces ou alternatives".
    Dans notre expérience, ces "cystite à urines claires" sont souvent associées à un terrain de trouble fonctionnels multiples, de surmenage et d’événements de vie difficiles.
    Pour certains auteurs, cette cystite (qui reste mystérieuse), serait due à un trouble de la muqueuse urinaire et porte le nom de cystite interstitielle. Comme pour la fibromyalgie et la plupart des troubles neurodystoniques, il existe des associations de malades qui revendiquent la reconnaissance de leur maladie. (par exemple : l’Association de la C.I. du Québec).

    Selon nous (si l’on aborde ce trouble comme un signal d’alarme de la fatigue), les malades pourraient bénéficier de conseils d’hygiène du sommeil et de meilleures compétences en chonobiologique du sommeil.
    Malheureusement, bien souvent, ici encore, cette approche globale ("somnicologique") des troubles neurodystonique est souvent difficile à faire entendre et comprendre.
    En l’absence d’argument lésionnels convainquant, le malade toujours très handicapé, se voit proposer de choisir entre les méthodes douces et les neurotropes (anxiolytiques, ou antidépresseurs à "visée antalgiques").

    La reconnaissance plus générale des rapports entre le sommeil et les troubles neurodystonique laisserait entrevoir une autre approche théraopeutique.
    Nous utilisons le néologisme de "somnicament" pour désigner les mesures comportementales destinées à améliorer l’efficacité du sommeil. (Cf. "Les somnicaments").
    Ces thérapies cognitives et comportementales ont fait la preuve de leur intérêt parmi les stratégies efficaces d’adaptation à la douleur. (Conseil de la Société des obstétriciens et gynécologues du Canada 2005).

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    L’examen des urines à la bandelette urinaire confirme ou infirme une infection de la vessie ou de la prostate


  • Troubles de la fonction sexuelle
  • - Perte de la libido
    "Pas ce soir, j’ai mal à la tête".
    Cette plaisanterie assez commune (à propos de couple en difficulté), met en avant le problème de la baisse du désir chez les personnes qui souffrent de fatigue.
    Les progrès en neurosciences du cerveau mettent en avant l’importance du sommeil dans un système de régulation commun aux troubles de l’appétit, de la libido et de la douleur.
    Selon nous, il est possible, avec cet éclairage somnologique, de mieux prendre en charge certains problèmes sexuels dont souffrent souvent les sujets fatigués.
    Il faut peut être s’arrêter sur cet aspect trop peu souvent pris en compte dans le bilan d’un tableau de fatigue chronique : le plaisir est un "somnicament" (Cf. plus bas), particulièrement vulnérable à la fatigue, ce qui peut être à l’origine d’un véritable cercle vicieux.

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    www.kansaiscene.com/2006_06/html/update.shtml


    Au Japon par exemple, (un pays réputé pour le nombre de suicides et de pathologies du surmenage, Cf Burnout ), Il se développe un problème de relations sexuelles. (Voir : couples sans relations au Japon [2]).

    - Troubles de l’érection
    Depuis la nuit des temps, la force de l’effet placebo a été utilisée dans le domaine des troubles de l’érection.
     [3]
    Et même si l’efficacité des nouvelles molécules est incontestable, leur réputation est telle que les contrefaçons ont parfois autant d’efficacité que les vraies (de fausses pilules bleues sont ainsi vendues pour du Viagra° sur internet, ou sur les marchés parallèles).

    Au final, on qualifie ces troubles de "psychogènes" lorsque des observations nocturnes montrent la persistance d’érections correctes au cours du sommeil paradoxal (environ 20% de la nuit). En l’absence de pathologie organique, il se produit une érection réflexe lors des phases de type de sommeil.
    Selon nous, ce terme "psychogènes" est assez discutable car l’importance du sommeil y est sous-estimé.
    De notre point de vue, les troubles de l’érection qui répondent bien à l’effet placebo, relèvent plus de la médecine du sommeil que de certaines approches trop psychologiques.


  • Troubles digestifs
  • Les Troubles fonctionnels intestinaux peuvent intéresser la région du bas-ventre.
    Selon notre hypothèse, la colopathie fonctionnelle (ballonnements, constipation, douleur) est un symptôme qui peut traduire des troubles du sommeil (c’est la raison pour laquelle il est si fréquent chez les travailleurs de nuit ou dans les suites d’un jetlag).

    - Hémorroïdes
    Les hémorroïdes se manifestent par la présence d’une congestion des veines de l’anus. les hernies veineuses qui s’en suivent sont responsables de douleurs et de saignements (sans gravité).
    « Il n’y a pas d’hémorroïdes sans troubles du transit à type de constipation », disait-on en faculté.
    Selon nous, il n’y a pas de constipation sans troubles du sommeil (L’insomnique eyt son cousin germain le constipé chronique, sont les damnées de la terre, faisait oberver avec justesse l’écrivain humoriste Pierre dac, alias San Antonio) mais les malades ne sont que rarement conscients de cet état de fait.

    Le bilan (souvent en urgence) qui suivra posera diagnostic et conduira à un traitement local associé à une prise en charge de la constipation.
    Nous pensons que le traitement de la constipation doit comporter une approche chronobiologique (mais c’est encore rarement le cas).

    Voir ; colopathie et sommeil.


    Le fonctionnement du tube digestif dans son ensemble reste essentiellement soumis aux contrôles du système nerveux automatique.
    Ce "little brain" (petit cerveau) entretient des relations étroites avec les rythmes du sommeil comme en témoignent les études sur les travailleurs postés ou les voyageurs transatlantiques (Cf. "Jet lag").

    La plupart des travailleurs de nuit souffrent de problèmes de constipation et d’hémorroïdes...

    Inversement (si l’on peut dire) le sens commun utilise nombre d’expressions triviales pour exprimer un sentiment de fatigue (tels que "plein le..." ou "plein les ...")
    Voir : "Système d’alarme"

    - Fissures
    La présence d’une lésion douloureuse (ou non) de la marge anale impose avant tout un avis spécialisé.
    Lorsque le bilan est rassurant, on évoque "le stress" parmi les causes possibles de certaines fissurations (très douloureuses) de l’anus.
    Ces lésions inexpliquées sont en général accompagnées d’un tableau de constipation mais qui est rarement mis en avant par les malades.
    En pratique, il s’agit souvent de sujets jeunes et soumis à des "événements de vie" difficiles et donc "somnotoxiques".
    Comme pour les hémorroïdes, ce trouble fonctionnel est également une pathologie "du jet lag". ou des "horaires postés".
    Le rôle de l’hygiène du sommeil est, selon nous, primordial dans la prise en charge de cette pathologie (handicapante, inquiétante et capricieuse), qui témoigne d’un niveau de résistance et de fatigue sévère.

    - Démangeaisons anales

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    l’Oxyure, un parasite intestinal de 2 mm


    La présence de prurit (démangeaisons) insupportables au niveau de l’anus est un trouble fonctionnel parfois à l’origine des fissures anales.
    selon notre expérience le diagnostic ne doit pas exclure une approche somnologique.

    Lorsque l’examen (clinique et endoscopique) est normal, et que le bilan parasitologique (oxyures +++) est négatif, il faut savoir évoquer un trouble du sommeil...
    Voir. "Colopathie et sommeil"

  • Douleurs atypiques
  • - Dysménorrhée (règles douloureuses)
    Il est démontré que le seuil général de la douleur est modulé par le contexte somnologique. Il baisse (la douleur est plus forte), en situation de privation de sommeil et en fonction du cycle circadien de la température (une étude récente suggère que l’accouchement est plus douloureux le soir que le matin).
    En pratique, on observe que les douleurs (provoquées par l’inflammation locale et les contractions de l’utérus) au moment des règles sont plus ou moins difficiles à supporter selon le niveau de fatigue.
    Selon notre point de vue, la prise en charge de ces douleurs, parfois très invalidantes (et qui résistent aux antalgiques classiques), doit comporter une approche chronobiologique du sommeil.
    Voir dans l’article "Thermothérapie et sommeil".

    - Pseudo appendicites...
    Le "point appendiculaire", la zone douloureuse qui fait évoquer une appendicite, est souvent l’objet de douleurs d’allure chirurgicales dans un contexte de surmenage.
    Certain cas conduisent volontiers à des opération intempestive.
    Cf. troubles fonctionnels digestifs

    - Névralgie coccygienne ?
    Ce sont des épisodes douloureux siégeant dans la région du coccyx et survenant par accès et favorisés par la position assise et lors de la défécation.
    La névralgie coccygienne survient parfois sans raison apparente et reste souvent inexpliquée (on évoque des "spasmes" des muscles de l’anus).
    Ailleurs, il est souvent plus rassurant d’évoquer un traumatisme du coccyx lors d’une ancienne chute ou d’un accouchement difficile.
    La part des "Faux Vrais-malades" dans ce contexte reste impossible à évaluer.
    Il est légitime de procéder à un test thérapeutique par des infiltrations de produits anesthésiques.
    En pratique, en cas d’échec du traitement rhumatologique, il est proposé une intervention chirurgicale.
    En cas de nouvel échec, le malade se voit orienté vers une approche "psychiatrique" de ses douleurs, avec prescription presque certaine de neurotropes.

    - Névralgie pudendale ?
    Concept de récupération ou forme particulière de fibromyalgie ?
    Ce diagnostic aux limites imprécises semble très proche de la névralgie coccygienne.
    On lui attribue aussi le nom de Syndrome d’Alcook (Cf. Doc.)
    Un exemple lu sur un Blog des rapports qui existent entre la fatigue et ces douleurs : "Posté le 01-02-2004 à 21:32:24 profilanswer : "Salut, moi aussi j’ai une névralgie du nerf pudendal ...
    En fait tu as mal dans la région pelvienne, comme un pic, un corps étranger entre l’anus et les bourses à l’intérieur !! et surtout quand tu es stressé !! N’est ce pas ??"
    ...

Au total ...


À l’instar des autres troubles fonctionnels, les troubles neurodystoniques qui siègent dans le pelvis surviennent chez des sujets (souvent jeunes) et qui présentent de nombreux autres antécédents médicaux mal compris (névralgies, migraines, vertiges, palpitations ...) peuvent avoir une origine somnicologique.

En l’absence de prise en charge spécifique autour du sommeil, ces tableaux risquent, selon nous, d’évoluer vers une fibromyalgie ou un syndrome de fatigue chronique.

L’éducation au sommeil autour des notions de chronobiologie nous semble importante dans la prévention du "train de symptômes" qui accompagne le parcours du combattant des personnes fatiguées.
Voir aussi la définition du "syndrome d’hyposommeil" .


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Quelques liens externes pour en savoir plus...

[1Il existe un bon marqueur de la désorganisation fonctionnelle du sommeil : c’est la fréquence des besoins d’uriner durant la nuit. Dans notre expérience, ce signe anormal se retrouve systématiquement. Au début de la maladie, le sommeil semble correct si ce n’est le besoin de se lever pour boire ou uriner plusieurs fois durant la nuit. Cette augmentation de la diurèse nocturne est la conséquence de l’effondrement d’un système "anti-diurétique" normalement très actif durant les phases de sommeil profond. Tout se passe comme si la nature avait prévu de respecter le sommeil des bons dormeurs en adaptant la diurèse à la taille de la vessie.
En cas de mauvais sommeil, les reins produisent plus d’urine que la contenance vésicale ne peut en accepter sur la durée du sommeil. Cette "pollakiurie nocturne" est aussi très visible chez les ronfleurs pathologiques (elle constitue un "signe d’appel" bien connu des somnologues).
Parfois, ce trouble est imputé, à tort, à une hypertrophie prostatique chez l’homme et à une "vessie instable" ou "trop petite" chez la femme... En l’absence d’éléments objectifs (exploration hémodynamique fiable), ces explications "ad hoc" sont révélatrices d’une méconnaissance des mécanismes du sommeil.

[2Sexless Couples in Japan. Japan Mental Health. Dec 2004.

[3A l’instar de la poudre de corne de rhinocéros (dont la forme évoque un phallus dressé), certains mollusques marins en forme de concombre sont encore très recherchés en Asie pour leur vertus aphrodisiaques malgré l’absence de toute preuve objective d’efficacité.